Discours d’Alexandre VIGNE, Maire de Lanuéjols :

« Chers amis,

Par ces quelques mots, je voudrais réfléchir avec vous sur l’idée du pardon, et rappeler que l’essentiel n’est pas de demander pardon mais au contraire de l’accorder à autrui.
C’est cette démarche difficile qui permet à un être humain de se départir de sa souffrance, de sa haine ou de son désir de vengeance, et de pouvoir enfin retrouver une vie libre.

Pourrait-il en être de même pour les peuples qui se sont affrontés, quelle que soit la guerre menée et les raisons qui les ont amenés à s’affronter, quelle qu’en soit l’époque, quels qu’en soient les protagonistes ?
Considérons que dans la guerre, la violence, les destructions, les exactions, la mort sont toujours de mise.

En témoignent tous ceux qui en sont revenus avec leurs blessures, leurs traumatismes et le poids de leurs souvenirs douloureux.
En témoignent tous ceux qui ne sont pas revenus et dont le souvenir reste pour toujours sur nos monuments aux morts.
Si nous devons demander pardon, c’est à eux, ceux qui ont souffert ou ont payé du prix du sacrifice ultime pour nous permettre aujourd’hui d’être encore libres.

A l’inverse, accorder le pardon est la seule voie pour renouer les liens entre ceux qui se sont déchirés.
Accorder son pardon n’est pas oublier, c’est seulement accepter de ne plus nourrir de haine et permettre à l’autre, s’il le veut, de ne plus en nourrir en retour.
Mais accorder son pardon, nécessite que l’autre puisse le recevoir et abandonne à son tour son désir d’humilier, d’offenser ou de continuer à faire payer le prix de sa propre haine.

Sera-t-il possible un jour que nos commémorations du 19 mars 1962 puissent traverser la méditerranée pour porter notre message de pardon et recevoir le même en retour, loin de toute exigence stérile de repentance.

Le philosophe Vladimir Jankélévitch nous a appris que :
« Le pardon est là précisément pour pardonner ce que nulle excuse ne saurait excuser, Il est fait pour les cas désespérés ou incurables. »

Que tous les 19 mars 1962 que nous allons commémorer longtemps, finissent par être entendus, reçus et acceptés comme des messages de Paix, porteurs de l’espoir, qu’ils  nous soient offerts un jour en retour et que des deux côtés de la Méditerranée, comme nous y invite l’historien Benjamin Stora, nous puissions enfin regarder la guerre d’Algérie en face.

Je vous remercie. »